J'ai deux mots à vous rire - Désordre du mérite

Il y a bien longtemps, chaque étudiant francophone était tenu de lire chaque matin le journal Le Monde, qui paraissait pourtant le soir. On disait de ce vénérable et austère quotidien qu’il était le journal de référence. Ces dernières années, outre que les étudiants ne sont incités à lire que le mode d’emploi de leur PlayStation, Le Monde a également perdu en réputation, au point que de malins esprits, lui reprochant une trop grande proximité avec le pouvoir, l’ont rebaptisé le journal de déférence. C’est vache mais bien trouvé. Et moins vache que "journal de révérence", terme choisi par le torchon d’extrême droite Valeurs Actuelles pour reprocher au Monde de ne pas applaudir à chaque massacre de civils palestiniens dans la bande de Gaza.

Il arrive pourtant au Monde, derrière sa une propre sur elle et sa présentation totalement vintage, de sortir des sentiers battus, voire de traverser en dehors des passages cloutés. En effet, malgré son apparence et sa tradition d’organe de presse bien élevé, il arrive que Le Monde se permette la publication d’une révélation, d’un écho de couloir ou bien d’une répartie secrète d’un puissant. Sans devenir pour cela l’annexe du Canard Enchaîné, le sobre et tristounet journal fondé en 1944 s’encanaille parfois quelque peu, comme un enfant sage qui oserait proférer un gros mot presque par inadvertance.

Ainsi, tout dernièrement, Le Monde a révélé une phrase que Madame Macron aurait soufflé à Arielle Dombasle (épouse du Monsieur dont le grand Pierre Desproges affirmait "Bernard Henri Levy, c’est un pseudonyme. Son vrai nom, c’est Trouduc"), je cite: "Les Français ne méritent pas mon mari."

La scène se passait en juin dernier à l’Élysée, lors de la remise des insignes de Grand Officier de je-ne-sais-quoi au chanteur décédé Michel Sardou. Pardon? il n’est pas mort. Ah bon. Il fait bien semblant, pourtant. Bref, lors d’une conversation entre septuagénaires blondes, la sentence est tombée, implacable: les Français ne méritent pas le mari de Brigitte Macron, lequel n’est autre que le président de la République Française.

Et dans ces circonstances officielles plus que solennelles (ça n’est pas tous les jours qu’on décore un chanteur mort – ah zut, j’oubliais…), dans ces circonstances exceptionnelles donc, la femme du type qui traite les Haïtiens de cons s’est confiée à la femme du mec qui est aussi philosophe que Hanouna est poète. Et ce qu’elle lui a dit vaut d’être médité. Les Français ne méritent pas son mari.