Protéger la protestation – ou bien la surveiller ?

Par Jang KapgenChristian Block Changer en anglais pour l'article original

Le droit de manifester est un droit constitutionnel luxembourgeois depuis 1868. Cependant, la manière dont nous exerçons ce droit est aujourd'hui remise en question. Alors que certain·e·s activistes mettent déjà en garde contre la coercition informelle à l'heure actuelle, une nouvelle législation pourrait officiellement restreindre le droit de manifester. Le Lëtzebuerger Journal s'est entretenu avec une militante, des représentant·e·s de la société civile et le gouvernement afin d'explorer ce que pourrait être l'avenir de ce droit fondamental.

Le mois dernier, on a appris que le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Xavier Bettel (DP), portait plainte contre une militante pro-palestinienne en raison d'une image satirique qu'elle avait postée de lui en ligne. Il y a quelques semaines, des collectifs pro-palestiniens luxembourgeois ont rapporté qu'une enseignante avait été licenciée par le gouvernement en raison de son activisme en ligne. Alors que ces affaires juridiques se dérouleront en coulisses dans les semaines et les mois à venir, la question de la liberté d'expression semble se trouver à la croisée des chemins : les gens doivent-ils commencer à craindre des répercussions pour leur expression politique ou l'État va-t-il prendre position pour renforcer nos droits constitutionnels ?

Esmeralda Wirtz, de l'ONG de défense des droits humains Amnesty International Luxembourg, déclare que "nous pouvons constater que certaines personnes sont plus ciblées que d'autres et que les voix pro-palestiniennes font l'objet d'une pression particulière". Dans le cas de l'activiste poursuivie par Xavier Bettel, "il s'agissait simplement d'activisme numérique" et "une ligne rouge a été franchie. C'est en quelque sorte le début de l'autoritarisme : cibler des individus qui ont dit la 'mauvaise' chose".

"Je suis vraiment désolée de ce qui leur arrive", déclare Leila (nom modifié pour préserver l'anonymat), une militante pro-palestinienne, à propos des militant·e·s susmentionné·e·s, mais elle affirme qu'il ne s'agit que de la partie visible de l'iceberg, qui a fait l'objet d'une grande publicité. Leila est impliquée dans l'activisme pro-palestinien au Luxembourg depuis 2023. Ayant elle-même des origines palestiniennes, cette cause lui tenait à cœur. Néanmoins, elle s'est retirée de la scène militante pour se protéger – après avoir été licenciée deux fois pour son propre activisme, interrogée par la police et témoin de l'intimidation d'autres militant·e·s.

Surveillance et intimidation

Elle raconte une expérience particulièrement troublante à la suite d'un rapport sur l'antisémitisme. Leila se souvient de plusieurs manifestations au cours desquelles des passant·e·s entièrement masqué·e·s prenaient des photos et des vidéos des manifestant·e·s. "On voyait juste le flash d'un appareil photo. C'était assez effrayant." Plus tard, elle a vu les visages de ses collègues militant·e·s, leurs organisations, leurs noms ainsi que leurs adresses de réseaux sociaux dans un rapport sur l'antisémitisme rédigé par le groupe Recherche et information sur l'antisémitisme au Luxembourg (RIAL). Son visage n'en faisait pas partie.

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