Les inégalités en héritage

Par Audrey SomnardLex Kleren

Et si les inégalités au Luxembourg venaient en partie de l'absence d'impôts au moment de la succession en ligne directe ? C'est en tout cas la piste lancée par une plateforme de réflexion émanant de la Chambre des salariés. Une idée largement taboue au Luxembourg, alors que tous les partis politiques défendent le statu quo.

Deux membres d'Improof, une toute nouvelle plateforme de réflexion de la Chambre des salariés (CSL), ont voulu jeter un pavé dans la mare en s'attaquant à l'un des grands tabous du pays : l'absence de droits de succession en ligne directe. Laurent Uhoda et Dylan Theis, conseillers économiques à la CSL, distillent leur réflexion en trois parties dans un premier article publié le 20 février dernier. Pour eux, cette absence de droits de succession accentue les inégalités qui se creusent dans le pays. "De manière générale, je dirais que ce qui distingue vraiment le Luxembourg des pays européens et limitrophes, c'est l'absence de droit de succession en ligne directe, c'est clairement une grosse différence avec la plupart des autres pays", estime Antoine Paccoud, chercheur au Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (Liser) en développement urbain et mobilité, cité dans l'article. En moyenne, entre 2018 et 2021, on dénombrait au Luxembourg un héritage passible d’un droit de succession pour quatre et demi exemptés. Pour Laurent Uhoda et Dylan Theis, "il existe donc là un gisement potentiel de recettes utiles afin de réaliser l’égalité des chances, sans doute, mais surtout des espoirs et des conditions en réduisant les écarts liés au milieu d’origine”.

Pour les deux auteurs de l'article, les inégalités se creuseraient sous couvert d'évoluer dans une société basée sur la méritocratie : "Dans le respect de l’apparente méritocratie ambiante, il paraît ainsi largement curieux et incohérent que le Luxembourg laisse octroyer ‘au mérite’ d’énormes bonus passablement défiscalisés et autorise en outre l’exemption de la transmission de ces bonus accumulés ; sauf si, bien sûr, mériter, c’est hériter (et profiter des avantages de la naissance) …"

Pour ces derniers, un impôt sur la succession serait donc un moyen de lutter contre ces inégalités : "La législation luxembourgeoise est en effet extrêmement favorable aux transmissions du patrimoine familial de génération en génération, de sorte que ni la fortune familiale ni les inégalités patrimoniales n’ont à en souffrir. Le Conseil économique et social ne s’y trompe par conséquent pas lorsqu’il affirme en 2018 que ‘l’utilité économique de l’impôt [sur les successions] est théoriquement identifiée comme moyen de limiter l’inégalité de la répartition des richesses ou d’enrayer la concentration excessive de celle-ci'. Au Luxembourg, il reste cependant largement inopérant."

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