Les sports de tir se retrouvent en marge de la société au Luxembourg. Métaphoriquement et, dans le cas du tournoi de tir au pigeon d'argile auquel le Lëtzebuerger Journal a assisté, littéralement. Retour sur un sport méditatif, mais victime de clichés.
Au fond de la forêt près de Differdange, à moins d'un kilomètre de la frontière avec la France, ça sent les préparatifs pour la fête nationale. Mais ce ne sont pas des feux d'artifice qui déchirent le silence de la forêt ─ bang, bang ─ toutes les quelques secondes. Non, ça sent la poudre noire – ou plus précisément la poudre sans fumée – parce qu'on tire. Une cinquantaine de tireur∙euse∙s venu∙e∙s du Luxembourg, de France, de Belgique et d'Allemagne se sont retrouvés ici pour le Grand-Prix du Luxembourg de tir au pigeon d'argile sur le terrain du Club des Tireurs Fosse et Skeet Differdange (CTFS). Répartis sur deux pas de tir, les participant∙e∙s attendent leur tour les un·e·s à côté des autres. Car il n'y a qu'un∙e seul∙e tireur∙euse à la fois ─ le maniement des armes exige de la discipline. Chaque tir est annoncé par un « Ah » bref mais bruyant, avec lequel les participant∙e∙s lancent les frondes souterraines activées par la parole, qui catapultent des « pigeons » ─ des frisbees orange en résine ─ dans une direction aléatoire, où ils doivent être abattus avec des fusils à pompe à deux coups. Chaque participant tire sur 100 cibles en une journée, et chaque tir réussi donne un point, que ce soit le premier ou le deuxième tir. Le gagnant est celui qui a le plus de points.
Entre les tirs, le silence règne, on parle à peine. Non seulement parce que la plupart des gens portent des protections auriculaires, mais aussi pour ne pas perturber la concentration des participant∙e∙s, explique Lena Bidoli lors d'une pause entre deux manches, tandis que nous observons les autres tireur∙euse∙s. Jusqu'à présent, la jeune femme de 28 ans est satisfaite de son taux de réussite ─ environ 19 pigeons d'argile sur 25 en moyenne par tour. « Mais il n'est que midi, et cela peut changer très vite. Une fois que l'on a perdu le rythme dans ce sport, on peut vite rater plusieurs tirs d'affilée… et ainsi gâcher toute la journée. C'est pourquoi il est important d'être pleinement concentré tout au long de la journée. » Celui·Celle qui se laisse déstabiliser par un ou deux tirs manqués n'a pas sa place ici : c'est un sport pour les têtes froides, « et un combat permanent avec soi-même », dit Lena, qui pratique le tir sportif depuis un peu plus de six mois et tente de rejoindre le cadre national en tant que seule femme actuellement : « C'est presque méditatif. J'ai toujours eu des problèmes de concentration, surtout à l'école, et ici je ne ressens pas du tout cela. On est simplement dans le moment présent. »
Accède à la suite du contenu.
-
Abonnement annuel185,00 €/an
-
Abonnement mensuel18,50 €/mois
-
Zukunftsabo pour abonné·e·s en-dessous de l'âge de 26 ans120,00 €/an
As-tu déjà un compte ?
Connecte-toi