J'ai deux mots à vous rire - Ultracrépidarianisme

Von Claude Frisoni Artikel nur auf Französisch verfügbar

La chronique hebdomadaire de Claude Frisoni.

Le mot est à la mode. Il a comme tout premier avantage de permettre aux pédants de jouer les cuistres. Ce qui n’est pas rien… L’ultracrépidarianisme qualifie les personnes qui parlent de ce qu’elles ne connaissent pas. Autrement dit, tout le monde. Car le sujet de conversation préféré de chacun, c’est lui-même. Or, on sait depuis Socrate que nul ne se connaît suffisamment. Donc, même en parlant de soi, on fait de l’ultracrépidarianisme. Ce truc imprononçable a été formé à partir d’une réplique de Pline l’ancien : alors qu’un cordonnier critiquait son art, il se serait exclamé « sutor, ne supra crepidam » c’est à dire : « cordonnier, pas plus haut que la chaussure ». Ce qui est assez méprisant et plutôt pourri comme réflexion. En français moderne, Pline aurait sans doute lancé « oh, le plouc, tu sais à qui tu parles ? Alors, occupe-toi de tes pompes et lâche-moi les baskets ». On a remplacé supra par ultra, un peu compliqué les choses et il est désormais possible de briller dans les dîners en ville ((qui n’existent plus) en balançant des phrases du genre : « c’est fou ce que les gens peuvent être ultracrépidarianistes, ces temps-ci ». Ce à quoi l’hôte répondra « Certes, je n’en disconviens pas, mais je vais aller chercher le gratin dauphinois ». Il est assez extraordinaire que ce mot compliqué, formé à partir d’une phrase latine, ait pu s’imposer. Car enfin, a-t-on jamais conçu un substantif à partir d’autres locutions latines, comme « Qui bene amat bene castigat » ?

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